Alors qu’il existe une forte publicité sur la mobilité européenne dans l’enseignement supérieur, beaucoup de lycéens se questionnent sur les programmes européens à destinations des 15-18 ans. Qu’en est-il vraiment ? Lea Nischelwitzer et Azzedine Marouf ont mené l’enquête sur ce manque de communication des programmes européens dans le secondaire.
Devant la grille du Lycée Leonard de Vinci à Tremblay (93), plusieurs lycéens quittent les cours soulagés. Parmi ces jeunes il y a Kenza, élève en terminale Pro Commerce. Si le foot et la lecture restent ses deux passions, elle s’intéresse de plus en plus aux questions européennes : « Même si je suis issue de l’immigration, je m’intéresse à ce continent et son histoire car aujourd’hui j’y vis, je suis française donc européenne ». À quelques semaines du bac, cette Tremblaysienne regrette de ne pas s’être investie plus tôt pour entretenir cette citoyenneté européenne : « J’aurais aimé faire des programmes européens quand j’étais en seconde ou en première. L’année prochaine, je vais faire un BTS Management des Unités Commerciales, j’ai l’impression que c’est trop tard maintenant ».
« On brûle nos cartes avant même de pouvoir jouer »
À l’instar de Kenza, Fatima Sacko est en terminale au Lycée Jean-Renoir à Bondy (93). Elle ressent un sentiment d’abandon vis-à-vis de l’Union Européenne. Pour celle qui rêve d’intégrer Sciences Po, l’Europe parait trop… lointaine : « Nous ne sommes pas vraiment concernés, tout est géré par les politiques et on ne sent pas que ça nous touche ». Entre deux soupirs, elle poursuit : « J’ai appris qu’il y avait plusieurs programmes à destinations des 15-18 ans mais quand tu es lycéenne, tu n’as pas forcément l’initiative de chercher par toi-même. Parfois on a besoin qu’on mette devant nos yeux ce qu’on peut faire ». Exaspérée, sa camarade Mariama Seidi déclare : « j’ai l’impression qu’on brûle nos cartes avant même de pouvoir jouer, en fait on ne sait même pas qu’on a des cartes. »
Fatima, Kenza, Mariama: comme elles, beaucoup d’autres lycéens regrettent un manque de communication de la part des organismes proposant des programme européens. Pourtant quand il s’agit des universités, la mobilité européenne est très présente. « Avec Erasmus +, il ne se passe pas une journée sans qu’on ne nous donne pas de flyers sur des programmes » partage Lina Achouchi, étudiante en première années de LLCER à la Fac de Lettre de Nice Sophia Antipolis.
« Il faut limite des professeurs bénévoles pour monter un dossier »
Depuis 2014, Erasmus s’intègre au nouveau programme Erasmus +. Plus ambitieux et plus simple, le projet « symbole de la citoyenneté européenne » se veut surtout plus accessible pour les établissements du secondaire, notamment pour les lycéens en formation professionnelle. Si sur le papier, Erasmus + permet une plus grande mobilité européenne pour les 15-18 ans, Véronique Buxtorf, coordinatrice de stage au lycée Georges Guérin à Neuilly sur Seine (92), pointe une mise en pratique plus difficile. Selon cette enseignante, les étapes administratives pour obtenir les subventions sont des « freins » à la construction d’un projet européen : « Oui il y a Erasmus + pour les lycées, mais c’est très chronophage, il faut limite des professeurs bénévoles pour monter un dossier. Quand on doit préparer le bac, on a autres chose à faire. »
Manon Klein, psychologue de l’Éducation Nationale au Centre d’Information et d’Orientation (CIO) de Strasbourg, dresse le même constat : « Malheureusement, les dossiers sont souvent très lourds, ça demande du temps de la part des enseignants volontaires qui doivent mettre ça sur leur temps personnel ». Pour résoudre ces difficultés, L’agence Erasmus + a mis en place des acteurs appelés « Développeurs Erasmus ». Leurs missions ? Conseiller et accompagner les professeurs à s’engager dans une démarche de projet européen.
« Pour nous c’est plus des conseillers de désorientation »
Manon Klein n’est pas juste psychologue de l’Éducation Nationale (ancien nom pour conseiller d’orientation-psychologue). Elle est aussi chargée de mission pour Euroguidance, un réseau européen présent dans différents CIO ( Marseille, Lille, Lyon et Strasbourg) ayant pour objectif de promouvoir la mobilité européenne. En plus de disposer de larges ressources numériques, l’organisme soutenu par l’Union Européenne intervient dans différents établissements scolaires afin de former les personnels d’orientation aux questions de mobilité européenne. « On effectue des formations, des séances d’information et on intervient dans les établissements scolaires en Alsace », indique Baptiste Giroult, lui aussi psychologue de l’Éducation Nationale chargé de mission Euroguidance. Le CIO de Strasbourg tend aussi à intervenir dans plus d’établissements comme l’affirme Danielle Podmilsak, directrice du centre : « On s’engage à avoir une mission nationale. On forme d’autres psychologues de l’Éducation Nationale pour qu’après, ils orientent les lycéens vers les programmes disponibles. La dernière formation a d’ailleurs eu lieu en Ile-de-France ».
À l’image de nombreux autres lycéens, Lucas Sampaio, élève en première STMG au Lycée Evariste Galois à Sartrouville (78) ressent un sentiment de défiance envers les psychologues de l’Éducation Nationale. « On n’a pas l’habitude de venir vers eux, c’est surtout les professeurs qui nous imposent un rendez-vous. Pour nous, c’est plus des conseillers de désorientation. ». Les programmes européens restent donc difficilement accessibles pour les lycéens qui n’ont pas toujours l’initiative d’aller chercher l’information auprès des psychologues de l’Education Nationale.
« Créer un atmosphère favorable au débat européen »
La mobilité dans le secondaire se fait essentiellement à titre collectif, c’est-à-dire pour toute une classe. Il faut donc que l’établissement ait une convention avec Erasmus + pour qu’un lycéen puisse vraiment faire un projet européen. Pourtant, d’autres programmes existent pour permettre aux jeunes de promouvoir leur citoyenneté européenne à titre individuel. C’est par exemple le cas du Parlement Européen des Jeunes (PEJ). « Notre mission est de créer une atmosphère favorable au débat européen », indique Edgar Perrin, directeur exécutif du PEJ. Cet organisme apolitique propose des sessions régionales à destination des lycéens. « Le PEJ-France a pu mettre en place depuis plusieurs années des sessions régionales qui réunissent 50 à 80 lycéens d’une même région. » Il y a aussi la possibilité de se rendre à l’étranger grâce au réseau PEJ présent dans toute l’Europe : « On est présents dans plus de 40 pays, tu peux nous contacter et on peut alors te proposer de partir à l’étranger » déclare Ségolène Chataing, chargée du développement du réseau. D’autres initiatives du PEJ sont proposées comme Forg’Europe, un programme destiné aux jeunes en filière professionnelle, lycée agricole ou zone d’éducation prioritaire. Il existe également un fond de mobilité qui finance à hauteur de 250 € le voyage d’un jeune à l’étranger.
Devant cet éventail de programmes, la fondation communique essentiellement sur les réseaux sociaux, notamment sur sa page Facebook. Cependant, Edgar Perrin admet qu’il y a encore des progrès à faire dans ce domaine : « Nous avons une page Facebook et un site internet mais ce n’est pas suffisant, ce n’est pas assez visible, on a besoin d’améliorer notre communication. » Selon l’étudiante Lina Achouchi, la communication des organismes n’est plus en adéquation avec les loisirs des jeunes : « On croit encore qu’on va sur Facebook alors que la plupart des jeunes n’y sont plus vraiment, aujourd’hui on est sur Twitter, Snapchat ou Instagram. »
Une intervention qui change une vie
Comme une dizaine de bénévoles, Edgar Perrin a connu le Parlement Européen des Jeunes (PEJ) quand il était lycéen. Il n’était alors pas intéressé par les institutions et enjeux européens avant l’intervention de l’organisme : « le PEJ est intervenu dans mon lycée, j’y ai participé et j’ai bien aimé, j’ai continué à la fac où je me suis impliqué à Lyon dans un comité régional du PEJ ». Après avoir obtenu sa licence en Sciences Politiques, le jeune homme de 21 ans entame une année de césure afin de plus s’investir dans la fondation. Edgar est aujourd’hui directeur exécutif du PEJ : « Je suis avec Ségolène le seul salarié, les autres sont des bénévoles, stagiaires ou en service civique ».
« Le plus important c’est que tu te fasses ton propre avis »
Dans l’objectif de toucher un plus grand public, le PEJ se rapproche des Maisons des Lycéens (MDL), des associations présentent dans chaque établissement gérés par les élèves. Ségolene Chataing explique cette nouvelle porte d’entrée dans le secondaire : « On devrait travailler avec eux aux assises nationales des MDL à Strasbourg, il y aura une vision européenne pour nous permettre de réfléchir comment les lycéens peuvent s’emparer des questions européennes ». Son collègue souligne l’importance des programmes européens : « Accéder aux programmes européens, c’est aussi la possibilité de découvrir quelque chose d’étranger, quelque chose d’enrichissant. Si après tu n’aimes pas l’Europe, au moins tu sauras pourquoi, le plus important c’est que tu te fasses ton propre avis ».
À l’image du PEJ, Florent Ternisien, professeur d’Histoire- Géo au lycée Jean Renoir à Bondy (93) est convaincu que ces programmes ont une place dans le cursus du lycéen. Il a déjà travaillé en 2014 sur un projet européen et affirme que c’est à travers l’école qu’un lycéen peut entretenir sa citoyenneté européenne : « Si l’on considère que c’est important d’être Français et d’habiter en France, alors il faut en faire de même pour l’Europe. » Il recommande de ne pas attendre l’enseignement supérieur ou au-delà, car il n’y a pas d’âge pour se sentir européen.
Cela concerne l’année de première ou de terminale. L’élève continue de suivre le programme français du baccalauréat tout en étant en immersion dans un autre pays.
Les dossiers sont à demander à son chef d’établissement et à rendre au plus tard au mois de février/mars qui précède le départ.
Toutes les informations sont sur le Bulletin Officiel avec une mise à jour sur le site Eduscol, sur la page concernant les bourses pour les lycées français de Londres, Dublin, Munich, Vienne, Madrid, Barcelone.
On retrouve également la liste complète des établissements français à l’étranger sur le site de l’agence de l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Certains établissements acceptent des élèves français sans bourse associée.
• le programme Brigitte Sauzay : d’une durée totale de 4 à 6 mois, il s’adresse aux élèves de la quatrième à la première. Le dossier doit être déposé au plus tard un mois avant le départ.
• le programme Voltaire : couvrant la totalité de l’année scolaire, il concerne les élèves de troisième ou seconde . Il est nécessaire de s’y prendre en avance à savoir fin octobre/début novembre pour un départ en mars.
Ces deux programmes sont basés sur le principe de réciprocité. L’élève part pour moitié de la durée en Allemagne et l’autre partie du temps, il accueillera son correspondant allemand dans sa propre famille.
Pour participer aux programmes Sauzay et Voltaire, il faut obtenir l’accord du chef d’établissement et des équipes éducatives : l’interlocuteur privilégié reste le professeur d’allemand. L'Office Franco-Allemand pour la Jeunesse (OFAJ) facilite la mise en place des échanges.
Ce programme implique la famille du jeune car celle-ci doit accueillir des jeunes étrangers pendant la mobilité de leur enfant.
Pour postuler, il faut s’adresser au Club Rotary le plus proche de son domicile dès le début de l’année scolaire qui précède le départ. En effet une sélection a lieu sur les bases des résultats scolaires mais surtout sur la motivation du jeune, sa curiosité pour les cultures étrangères et sa capacité à s’investir dans des projets.
Les frais d’hébergement et de scolarité sont pris en charge par le Rotary Club et il reste à la charge des familles le coût du transport, les divers frais administratifs ainsi que l’argent de poche.
Informations sur le site du Rotary et directement auprès du Rotary club le plus proche du domicile.
Si certains organismes proposent des aides financières sur critères sociaux, le coût est en général supporté entièrement par le jeune et sa famille, les prix démarrant autour de 5 500 € tout compris et pouvant atteindre plus de 15 000 € pour une année.
Il faut dans la grande majorité des cas avoir entre 15 et 18 ans et ne pas avoir encore obtenu le baccalauréat!
Il s’agit d’une parenthèse dans la scolarité du lycéen qui reprend ensuite sa scolarité en France, là où il l’a laissée avant son séjour. Cette mobilité peut être préconisée à des lycéens en première ou seconde, mais il est impératif de s’assurer des conditions de reprise de la scolarité auprès du chef d’établissement avant le départ.
Un label de qualité permet de vérifier le sérieux des organismes prestataires. On peut aussi se référer aux organismes adhérent à l’Union Nationale des Organismes de Séjours et Stages Linguistiques.